Bienvenue dans cette entrée numéro 2 de notre live report dédié au Motocultor 2024 en direct de Carhaix ! Après une première journée sous une pluie diluvienne qui nous a permis d’assouvir notre curiosité concernant le site de Kerampuilh, les artisans, les associations et le staff, voici venir le moment que vous attendiez tous : les live reports !
Arrêtez-vous un instant et écoutez-moi : cette seconde journée de notre périple sera l’occasion de réaliser plusieurs grands écarts musicaux en un peu plus de 14 heures. L’occasion de découvrir des groupes de folk, breakcore, prog ou encore black métal !
Les Compagnons du Gras Jambon
Pour ce premier concert du vendredi, direction les tentes ! Ça tombe plutôt pas mal sachant que la pluie continue à tomber ! Les Compagnons du Gras Jambon nous accueillent par surprise avec des instruments assez inattendus tels qu’un Nyckelharpa et des chants de gorge en guise d’introduction.
Le groupe, au sein duquel tout le monde chante, est clairement heureux d’être là et le public le lui rend bien ! Les Compagnons du Gras Jambon nous ont promis un tour du monde en chanson et notamment un passage par les îles Féroé avec le morceau Ólavur Riddararós. Le seul morceau en français s’intitule J’aime la galette, jolie dédicace à la Bretagne ! Le groupe n’hésite pas à plaisanter sur scène, comme le témoigne le solo de triangle réalisé avec brio par la percussionniste, qui fera l’objet d’un rappel.
En conclusion : un son impeccable pour le premier groupe de la journée, une bonne ambiance contagieuse et une superbe alternance des passages mélancoliques, instrumentaux et par ceux plus rythmés grâce à la présence scénique incroyable du chanteur.
Hippotraktor
Sans transition, on se dirige sous le chapiteau de gauche pour Hippotraktor, formation belge de progressive post-metal du label Pelagic Records qui célèbre au Motocultor son tout premier concert en France ! Étant moi-même très impatient d’enfin les voir en live, je remarque beaucoup de T-shirts de Psychonaut dans le public, autre groupe du vocaliste/percussionniste Stefan De Graef.
Dès le premier morceau, on reconnaît que l’on a affaire ici à un groupe issu de Pelagic Records : c’est un véritable mur de son qui nous percute avec le premier morceau Renegade issu de leur dernier et seulement (!) second album Stasis (2024). Le headbang est inévitable et contagieux dans le public même avant l’arrivée du chanteur qui se place en milieu de scène, laissant le devant des projecteurs aux musiciens tout comme une autre formation belge, AMENRA, le propose en live.
Très bonne présence sur scène du chanteur Stefan De Graef qui n’hésite pas à intervenir en jouant des percussions sur tous les morceaux, se baladant, dansant librement sur scène et en réalisant des chorégraphies avec le micro-câble de la même manière que J.J., le chanteur de Harakiri for the Sky ! Les musiciens sont également clairement heureux d’être là : ils sont souriants et s’éclatent sur de longues séquences instrumentales et cinématographiques à la Hypno5e, offrant également un solide backing vocal en clair et scream.
En conclusion : une prestation d’une propreté exemplaire, qui laissera une marque dans la carrière d’Hippotraktor en tant que sans-faute pour une première au Motocultor ainsi que sur le territoire français ! Pour les fans de The OCEAN, courez donc voir ce groupe qui envoie du TRÈS lourd et que je retournerai voir avec grand plaisir.
Setlist : Renegade, Manifest the Mountain, Mover of Skies, God Is in the Slumber, Stasis, Beacons
Slow Fall
On enchaîne avec Slow Fall dans la pure tradition du mélo death Finlandais ! Dès l’introduction, le synthé nous annonce la couleur façon In Flames ancienne époque du début des années 2000 (album Come Clarity, etc.). Le groupe parvient à habilement mélanger la voix claire et gutturale, mélodies death et groovy et solos de guitare/synthé, le tout dans la seule et même chanson Polaris. Les intros, outros et solos de synthétiseurs nous renvoient avec beaucoup de nostalgie à Children of Bodom tandis que la voix claire poussée me fait clairement penser à Amorphis ! Tout le monde à le sourire sur scène, ce qui me rappelle un autre groupe de mélo death mais Suédois ce coup-ci dont la bonne humeur est contagieuse : je parle bien sûr de Dark Tranquility dont le chanteur sera présent au Motocultor ce dimanche.
En conclusion : difficile de croire que le groupe Slow Fall n’a été fondé qu’en 2016 : les membres sont extrêmement à l’aise sur scène et le show est plus que carré. La relève du melo death Finlandais est assurée par cette formation avec 3 nouveaux singles sortis en aout.
WIDILMA
Immersion dans l’histoire et la culture des peuples celtes avec WIDILMA. Son univers est parsemé d’ésotérisme, d’histoire et d’interprétation personnelle comme en témoigne ce passage remarqué au Motocultor !
L’arrivée sur scène de la chanteuse s’effectue encadrée par des personnages anonymes, masqués et totalement silencieux. Ces derniers l’encerclent et la surveillent de près. Le premier morceau est interprété au milieu de ces figures inamicales, intégralement a cappella puis seulement accompagné d’un tambour qui ne quittera plus la chanteuse. Un mantra est répété à l’infini afin d’activer une à une ces présences, nous régalant d’une prestation scénique très bien orchestrée.
Les percussions tribales prennent aux tripes, le chant est également d’une puissance et d’une intensité qui transcende l’instant présent, nous renvoyant dans les steppes, les forêts, si proches et pourtant si lointaines de ce Finistère actuel. Le public n’y est pas hermétique et le montre avec des clameurs dès le second morceau !
En conclusion : le morceau Hi Blaidd m’a particulièrement touché : un mantra, une montée en puissance, une tension tout au long du morceau, bref… Ce live a été passé en état de pseudo-trance collective et je ne doute pas que l’expérience WIDILMA puisse être encore plus grandiose en salle !
1914
Nous quittons l’abri des tentes et l’ambiance folk pour nous diriger vers le black métal martial de 1914, groupe ukrainien qui avait dû annuler sa venue au Motocultor 2023 en raison du conflit en cours dans leur patrie.
Cette situation nous est rappelée dès l’arrivée sur scène du chanteur, gueule boueuse, démarche lente et lourde de fatigue et de combats, drapeau ukrainien fermement serré au poing. Le public acclame la symbolique de cette arrivée, le chanteur ne lâchera pas son drapeau de la chanson qui sera ensuite fixé à la batterie pour la suite du concert. La présence scénique du chanteur Dmytro Ternushchak est incroyable : lorsqu’il ne chante pas, il arpente la scène au pas, regard perdu, traumatisé par les horreurs de la guerre. Usé, mais toujours debout.
En conclusion : une performance impeccable, une vengeance accomplie avec brio après n’avoir pu être présent au Motocultor 2023. 1914 confirme leur importance sur la scène black métal 10 ans après leur création et malgré les épreuves traversées.
Setlist : Intro, FN .380 ACP#19074, Vimy Ridge (In Memory of Filip Konowal), …And a Cross Now Marks His Place, Corps d’autos-canons-mitrailleuses (A.C.M), Mit Gott für König und Vaterland, A7V Mephisto, Arrival. The Meuse-Argonne, Passchenhell
Myrkur
Direction les terres scandinaves et plus particulièrement le Danemark avec Myrkur ! Derrière ce nom se cache le projet solo de la chanteuse et multi-instrumentiste Amalie Bruun.
L’énergie est très différente comparée à WIDILMA. L’ambiance est en effet plus éthérée, vaporeuse et douce. Myrkur a fait le choix d’une setlist très majoritairement composée de son dernier album, Spine (2023) au détriment des méga-tubes de l’album Folkesange (2020). En effet, seule la chanson Leaves of Yggdrasil sera interprétée en ce qui concerne cet opus. L’absence d’instruments traditionnels se fait ressentir lors de ce live, ces derniers sont en effet remplacés par des synthétiseurs, ce qui résulte en une petite déception au sujet de l’expérience folk attendue. Néanmoins, les voix des deux chanteuses sont absolument incroyables et envoûtantes.
En conclusion : petite déception personnelle liée au choix de la setlist et des instruments sur scène. L’album Folkesange n’a que 4 ans mais est grandement passé à la trappe tout comme les instruments traditionnels. Hormis ces points hautement suggestifs, le concert était agréable, une bonne redescente calme après 1914.
Setlist : Bålfærd, Like Humans, Mothlike, Spine, Valkyriernes sang, Dybt i skoven, The Serpent, Blazing Sky, Devil in the Detail, Leaves of Yggdrasil, Ulvinde
Sowulo
On conclut notre épopée du folk/pagan metal en cette seconde journée avec Sowulo, projet néerlandais mené par le multi-instrumentiste et chanteur Faber Horbach.
L’ambiance sous la tente est extrêmement tamisée, intimiste. Ce sentiment est renforcé par la sobriété de la scène, des éclairages et des tenues des musiciens, tout en simplicité. Un rituel d’éveil nous accueille pour démarrer cette invitation à la célébration de la nature. Les éclairages choisis sont dans des gammes naturelles et vont dans l’esthétique et l’univers du groupe : nous vivons avec le groupe des levers de soleil, zéniths et crépuscules.
Les instruments traditionnels que nous avons l’habitude d’entendre en version studio (notamment sur l’album acoustique Sol (2016)) sont bien présents sur scène. La harpe est en effet omniprésente et inratable avec un système lumineux que l’on a pu découvrir au cours de la prestation du groupe. Faber réalise même une démonstration de Carnyx, corne de guerre et instrument celte datant de l’âge du fer. Cette performance a plongé le public dans une contemplation générale, nous permettant de comprendre la terreur que vivaient les envahisseurs face au son produit par cet instrument.
En conclusion : étant plutôt un connaisseur de Sowulo pour leur travail instrumental, les voir en concert avec des voix masculines et féminines permet d’ajouter encore plus de vie et de profondeur à leur œuvre. Le concert est passé bien trop vite, vivement un nouveau passage en terres bretonnes !
Myrath
Changement d’horizon en passant seulement d’une tente à l’autre : voici venir le rayon de soleil power/prog rock Myrath de Tunisie qui vient défendre son dernier album Karma (2024) !
La tente déborde déjà plusieurs minutes avant le coup d’envoi. L’ambiance y est déjà très chaude et bonne enfant pendant les tests sons, preuve de la popularité du groupe Myrath. La scénographie nous rappelle les racines et la fierté que l’on connaît du groupe à incorporer des thèmes et instruments orientaux. À l’approche du premier morceau, des projections lumineuses au plafond de la tente achèvent de faire monter en pression le public qui explose à l’arrivée des musiciens, ces derniers étant toujours aussi souriants et heureux d’être là.
Comme attendues, les sonorités et l’énergie de Myrath nous réchauffent le corps et l’âme dans ce Finistère qui n’aura rien trouvé de mieux que de refaire tomber la pluie, c’est un comble ! Tout comme la première fois que j’avais eu la chance de voir le groupe, des interventions ont lieu tout au long du concert et permettent de garder un sacré rythme ! Danseuses, intermède de prestidigitation, interactions avec le public du chanteur Zaher Zorgati… Bref, Myrath sait capter et retenir notre attention et on en redemande toujours plus !
En conclusion : c’est toujours un plaisir sincère de retrouver Myrath, que l’on soit un connaisseur de leur discographie ou simplement curieux : le groupe a cette particularité de mettre tout le monde d’accord.
Opeth
Nous voici face à la Dave Mustage, la plus grande scène du Motocultor pour célébrer la tête d’affiche de cette seconde journée : le mastodonte suédois du prog avec plus de 30 ans de carrière, ses albums impeccables et son leader charismatique : Opeth ! Ayant raté leur concert de 2023, il s’agit là d’une revanche personnelle.
On commence fort les hostilités avec la chanson The Grand Conjuration : tapping, voix claire, growl, pauses calmes, changements de rythme à foison… Bref du grand Opeth old school ! Le chanteur, compositeur et guitariste Mikael Åkerfeldt ne semble pas vieillir et tant mieux pour nous ! Entre les chansons, il perpétue sa tradition de raconter des blagues, des anecdotes (comme quoi ils revenaient d’Istanbul, qu’il a de la chance d’être au sec sur scène et pas nous, etc.) et d’interagir avec le public. Dans la continuité de ces intermèdes, le groupe a même réalisé la cover du titre You Suffer de Napalm Death, morceau connu pour durer… 1 seconde.
Dans l’ensemble, le groupe est extrêmement qualitatif : pas un raté, pas une hésitation, c’est clairement l’expérience qui parle après plus de 30 ans de carrière et une persistance des membres exemplaire. Le son était très feutré : ni trop fort ni trop faible. Il s’agissait clairement du concert avec le volume le plus bas de tout le festival.
Opeth nous a régalé d’une ballade tout au long de leur (grande) discographie en seulement 6 morceaux, nous jouant des titres de pas moins de 5 albums. Chose extrêmement inattendue de leur part : aucune chanson « récente » n’a été jouée au cours de ce concert. Je parle ici d’aucun titre datant d’avant l’année 2008 avec l’album Watershed ! Pour le fan old school d’Opeth et de l’album Blackwater Park (2001) que je suis… Autant vous dire que j’ai été comblé ! Pour les fans plus récents… J’ai ressenti autour de moi qu’une partie du public était un poil larguée par l’absence de titres « connus » issus des 4 derniers albums, notamment Sorceress (2016) qui, à l’époque, avait permit d’élargir l’audience du groupe.
En conclusion : une setlist qui a sans doute divisé les fans de la première heure et les plus récents. Sur ce point, j’ai été personnellement enchanté ! Quel plaisir de voir qu’Opeth est toujours aussi actif après 30 ans de carrière et avec un nouvel album The Last Will and Testament prévu pour le 11 octobre 2024 qui sent bon le retour aux sources !
Setlist : The Grand Conjuration, Demon of the Fall, You Suffer (Napalm Death cover), The Drapery Falls, Heir Apparent, Ghost of Perdition, Deliverance
Igorrr
Après 13 heures de concerts dans les pattes, voici venu Igorrr, l’Objet Musical Non Identifié Français mené par Gautier Serre. Comment décrire Igorrr ? Certains parlent de Breakcore baroque, de Noise, etc. Igorrr c’est pour moi avant tout de l’émotion, de l’exploration artistique, faire entrer ce projet dans une boîte serait plus que réducteur.
Gautier Serre trône en tant que maître de cérémonie et chef d’orchestre du haut de son estrade située en milieu de scène. L’introduction nous met directement dans l’ambiance avec du pur breakcore et la première apparition des jeux de lumière qui vont rythmer ce concert d’une teinte rouge de chez rouge.
L’attente était palpable dans le public et c’était légitime ! Les fans attendant en effet de pouvoir juger les nouveaux vocalistes de Igorrr. Le premier à s’élancer est JB Le Bail, qui réussit le pari haut la main : sa voix est puissance et éraillée au possible, la technique est propre et on sent qu’il a su s’approprier les chansons du répertoire d’Igorrr. L’arrivée de la déesse Aphrodite Patoulidou, toute de rouge vêtue, n’est pas du tout passée inaperçue, la mezzo-soprano nous a fait une démonstration impeccable de contrôle de voix, toutes les techniques y sont passées ! Quel plaisir de voir Gautier Serre anticiper et mimer les changements de rythme, breaks, parties vocales de ses chanteurs : la machine est taillée pour le live et est TRÈS bien huilée.
En conclusion : pas mal de chansons du dernier opus Spirituality and Distortion (2019) sans oublier les good ol’ classics de Igorrr, pour satisfaire l’intégralité des fans et curieux qui se seront risqués dans l’arène en cette clôture de seconde journée du Motocultor 2024 ! Pari réussi pour les nouveaux membres composant la formation de Igorrr : l’avenir semble toujours aussi radieux pour le projet de Gautier Serre.