La puissance évocatrice d’un nom dans le monde du rock, est souvent autant lié à la musique
auquel il est associé qu’au mythe auquel il renvoie. « Led Zeppelin » ou « The Who » évoquent
foncièrement l’alchimie des quatuors formant ces deux groupes.
L’âme de l’amateur vibre à leur simple évocation, ces noms résonnants désormais tels des légendes au travers desquelles peut
vagabonder l’imaginaire, le goût pour les histoires.
À contrario, certains groupes populaires ne font écho à aucune personnalité particulière, en dehors
des cercles de fans. Pour la raison simple qu’avec le temps, tant de musiciens y ont évolué qu’il
devient difficile de donner à ces formations un visage, une identité … Et la tentation de les
réduire à un tube existe. Pourtant, en dépit des nombreux personnages y ayant transité, jamais
Deep Purple n’a accueilli de musiciens interchangeable. C’est ce que n’a pas manqué de
rappeler Glenn Hughes lors de son passage à l’Elysée Montmartre le 6 novembre 2018, pour
un concert hommage à la période l’ayant vu évoluer au sein du groupe.
« Si vous connaissez mon parcours, vous savez la chance qu’il m’est donné d’être devant vous ce soir ».
Le bassiste-chanteur Hughes est sans nul doute un miraculé, mais son talent ne doit
rien à la chance. Sous son influence, Deep Purple opère entre 1973 et 1976 un virage vers les
rivages de la soul et du funk, une période riche dont ne subsiste souvent que la chanson Burn
dans les mémoires collectives.
C’est un show d’1h30 revisitant ces années que propose Glenn Hughes ce soir-là, précédé en
première partie du groupe de hard rock australien Koritni, dans une formation « unplugged »
réduite. Introduit par un enregistrement de Jon Lord (le claviériste originel de Deep Purple),
Hughes investit la scène tel un prince au son de l’épique Stormbringer, immédiatement suivi des
emblématiques Might Just Take Your Life et Sail Away. Trois titres laissant tout le loisir de
constater qu’en dépit d’une légère grippe, l’homme – connu pour l’étendue de ses acrobaties
vocales – conserve un timbre inchangé du haut de ses 66 ans. Une gageure dans le monde du
hard rock.
Gettin’ Tighter, quatrième chanson du set, laisse le funk prendre les rênes. Issu du singulier
album Come Taste The Band (1975), le titre est l’occasion pour Hughes de rendre un hommage
appuyé à l’extraordinaire Tommy Bolin, malheureux second guitariste de Deep Purple, décédé
tragiquement en 1976. Le bassiste poursuit avec le titre le plus soul qu’ait jamais produit le
groupe anglais, l’intense You Keep On Moving, à l’origine interprété en duo avec son
comparse David Coverdale.
La volonté d’une fidélité rafraîchissante au matériau d’origine apparaît clair à mesure que se
déroule le spectacle. À cet égard le trio guitare/clavier/batterie accompagnant Glenn Hughes
réalise correctement son office, sans jamais prétendre se hisser au niveau du Purple de 1974.
De fait, si l’humilité et la gratitude affichés de Hughes se drapent dans la bannière géante à son
effigie, la mise en scène et la structure du concert parviennent à convoquer le souvenir des
heureuses extravagances du passé, tel le mythique live de Deep Purple au festival California
Jam. Elles y parviennent également dans leur évocation des longues improvisations auxquels
s’adonnaient le groupe entre deux galops du titre You Fool No One, ou lorsque Hughes choisit
d’interpréter deux titres mythiques du Deep Purple classique, Smoke On The Water et Highway
Star comme il le faisait dès 1973. Dans cet effort se révèle précisemment l’authenticité de son
personnage.
À l’issue d’une dernière partie restituant entre autre la fureur bluesy de Mistreated, et l’infernal
train baroque de Burn, une idée ancienne revient à l’esprit. Ce fantasme auquel tout fan de
Deep Purple a un jour songé. L’advenu d’un concert. Un moment unique, un dernier adieu où
serait convoqué tous ces musiciens encore présents et qui – un jour – façonnèrent le visage de Deep Purple.
SETLIST
Stormbringer
Might Just Take Your Life
Sail Away
Gettin’ Tighter
You Keep On Moving
You Fool No One
Mistreated
Smoke On The Water
Burn
Highway Star
Article et vidéos (Smartphone du public) par Thibaut Saez
Merci à Replica Promotion.