Résumé du festival Hellfest 2018 – Jour 1. Live Report et photographies de Aure Briand-Lyard, Christophe Mielot et Charles Pozzo Di Borgo.
The Chris Slade Timeline
Le début d’après-midi de cette première journée en enfer s’annonce bien amorcé. The Chris Slade Timeline, késako ? Ni plus ni moins que la bande de l’ex-batteur d’AC/DC, qui a officié chez les Australiens pendant cinq ans début nineties. On lui doit entre autre Big Gun et The Razors Edge ! Ici, c’est avec son projet solo qu’il vient faire trembler la Mainstage : un tribute band célébrant ses cinquante ans de carrière emblématique. Le gallois de 70 ans passé, toujours au plus haut de sa forme, est accompagné de cinq musiciens de talent pour un set de reprises des frangins Young, dans une ambiance revival toujours plaisante.
Bun Davis, chanteur au timbre éraillé, grimpe dans les aigus avec une dextérité à la Brian Johnson. Après une ouverture percutante sur Dirty Deeds, se joue un véritable enchaînement de tubes, entre Thunderstruck, Back In Black et Highway To Hell. En somme, une sélection de morceaux choisis qui électrisent la foule, dans un dynamisme survolté !
Rose Tattoo
Les gueules cassées du hard rock Australien, sur la route depuis ’76, débarquent pour un live couillu au Hellfest sous un soleil ardent. Le lineup au look de repris de justice forme un groupe-erzatz d’AC/DC en encore plus rugueux ! Dès les premiers riffs agressifs, une impression émane d’être face à une escouade de Hell’s Angels en vadrouille. Les motos en moins. Tous vêtus de gilets de cuir aux insignes du groupe, à l’image de Black Label Society, les gaillards ne sont pas là pour plaisanter.
Au programme, un rock bien gras, tout ce qu’il y a de plus traditionnel, usé par les kilomètres. Angry Anderson, frontman venu de Melbourne et bouteille de whisky au poing, leade le groupe avec une prestance animale. On l’aura compris, le heavy metal est un truc de mauvais garçon ! Car Nice Boys Don’t Play Rock N’Roll, comme le chante Angry dans leur chanson phare. Rose Tattoo délivre un live excellent et sans aucun temps mort, véritable célébration de la « badass » attitude.
Joan Jett & The Blackhearts
Ex-Runaways dans les seventies, Joan fait désormais cavalier seul. La belle est maintenant loin de ce groupe d’adolescentes, un all-women band audacieux où elle s’était distinguée aux côtés de l’ingénue Cherie Currie, pour entonner Cherry Bomb dans des duos aussi explosifs que langoureux.
C’est accompagnée des Blackhearts que la pionnière du hard rock féminin post-Suzi Quatro scinde la scène principale, dotée d’une pêche d’enfer à presque soixante printemps. Toujours svelte, dynamique, Joan est vive et alerte. Difficile d’imaginer que la star est sortie de l’époque teenage qui lui va pourtant si bien ! Tout en cuir, liner – sa marque de fabrique – et cheveux de jais en pétards punk. Joan alterne entre doigts d’honneurs affectueux pour un public qui ne faiblit pas, et allers-retours entre les deux pôles de la Mainstage, qu’elle habite comme une impératrice.
Tous les tubes y passent, allant du lancinant Crimson and Clover, parfait pour des flirts au goût rétro, aux provocs Fetish et Do You Wanna Touch Me, en passant par un Bad Reputation très endiablé. Enfin, les premières notes d’I Love Rock N’Roll retentissent, reconnaissables entre toutes, prenant des airs d’hymnes de stade d’une universalité contagieuse.
Benighted
Benighted est venu à Clisson défendre son dernier effort Necrobreed et attaque donc sa prestation sur les chapeaux de roues avec « Reptilian » dont il est extrait. L’ambiance déjà survoltée avant même le début du concert monte déjà de plusieurs crans. Le son est puissant, les musiciens carrés et Julien le frontman, communique beaucoup comme à son habitude pour le plus grand bonheur des nombreux fans. Dès le 2eme titre, « Let the blood spill between my broken teeth », les circle pits succèdent aux slams et walls of death. Outre « Reptilian », « Versipelis » et « Necrobreed » sont également envoyés droit dans la face du public. « Cum with disgust » est interprété avec Arno de Black Bomb A comme sur l’enregistrement original, encore un grand moment. Benighted balance une dernière tuerie avec la reprise de Sepultura « Biotech is Godzilla ». Fin d’un set puissant qui a retourné l’Altar !
Demolition Hammer
Les thrasheux de Demolition Hammer se produisent sous la tente de l’Altar. Ils nous délivrent comme à leur habitude un set carré, puissant et pied au plancher. Leur énergie fait plaisir à voir et emporte tout avec elle. James Reilly véritable « gueule » du groupe enchaîne les solos et les grimaces improbables tandis que son compère Steve Reynolds arrangue la foule sans répis. Les slams s’enchaînent et l’Altar est en fusion ! Une petite heure plus tard le déluge cesse laissant l’Altar épuisé !
Europe
Place aux monstres sacrés du rock, programmés en fin d’après-midi d’une première journée de festival plus que prometteuse. Les suédois d’Europe, toujours impeccables, incarnent avec splendeur l’âge d’or du heavy metal – on a rarement fait mieux en matière de hard pop à la Bon Jovi ! Crinière wavy entre rétro et ringardise, vestes assorties… Les bellâtres gardent la pêche de leur jeunesse, occupant l’espace avec la confiance de ceux qui ont de la bouteille.
Joey Tempest flirte avec les aigus, fort d’une aisance presque scandaleuse, épaulé par John Levén dans une gémellité stylistique qui porterait presque à confusion ! Entre le très dansant Rock The Night et The Final Countdown que l’on ne présente plus, l’esprit est à la fête. L’audience semble portée par une joie unanime, bien que certains titres du répertoire d’Europe peinent à se distinguer du lot. Les suédois font partie de ces groupes à tubes, possédant la particularité si rare de ne pas prendre une ride au passage des nouvelles décennies. S’inscriraient-t-ils dans un panthéon intemporel, à la notoriété mondiale justifiée ?
L’avis de Christophe
Europe déboule sur la Mainstage 01 au son de leur solide dernier album « Walk the Earth », avec le titre du même nom, suivi d’un convaincant « The Siege ». Les suédois évitent le piège du best off des années 80 en proposant un set équilibré. Équilibré entre les tubes de leur 1ère partie de carrière et les titres plus récents. Les productions plus récentes du groupe sont bien accueillies. Mais comme on pouvait s’y attendre les titres plus anciens (« Supersitious », « Scream of Anger », « Rock the Night », « Cherokee ») remportent d’avantage l’adhésion du public. Et LE titre tant attendu arrive enfin. Et tous les metalleux présents, fans de death metal, de thrash, de black, se lâchent et reprennent en cœur. « It’s The Final Countdown » ! Mission accomplie pour Europe !
Sólstafir
Venu tout droit des terres sauvages Islandaises, Sólstafir est là pour durer. Le groupe porte d’ailleurs bien son nom – se traduisant par rayons crépusculaires dans la langue de Molière – aussi lunaire et mélancolique qu’un poème de la fin du Romantisme Noir. Avec plus de vingt ans d’existence au compteur, les gaillards semblent issus d’un autre espace-temps, entre cheveux nattés et barbes flamboyantes dignes de l’ère des Vikings.
Sólstafir délivre d’ailleurs l’une des meilleures prestations du festival, à l’authenticité rare, dans une réelle communion musicale proche de la transe. Avec un son atmosphérique, entre blues rock mélodique et stoner metal, l’expérience immersive est totale. La majorité des morceaux avoisinent d’ailleurs les dix minutes… C’est le cas de leur tube Fjara, au top classement du hit parade en Islande, qui promet une puissance de composition brillante.
Hollywood Vampires
Que penser de ce superband hallucinant ? Mix de Johnny Depp à la gratte, d’Alice Cooper et de Joe Perry en version vampirique sanguinolente et grimée ? C’est ce que l’on se demande forcément devant ce live en demi-teinte, vendu en phénomène sensationnaliste du Hellfest 2018. Hollywood Vampires surprend déjà par son manque de compositions originales, point particulièrement décevant pour ces grands noms du rock.
Quant aux reprises, elles sont bien choisies, percutantes, faites pour animer la salle – pas bêtes, les vampires… The Jack d’AC/DC, Ace Of Spades, Sweet Emotion d’Aerosmith, School’s Out et I’m Eighteen issues du répertoire de Cooper… Aucune prise de risque, mais des sons entraînants et bien jammés. Sans surprise, le public adhère sans aucune difficulté.
N’est-ce rien d’autre qu’une facétie garnie de second degré ? Ou au contraire, un projet en chair et en os, kitsch et grandiloquent, qui a pris corps dans l’esprit et l’ego de ces monstres sacrés ? La question reste ouverte.
Stone Sour
Corey Taylor et sa team arrivent en grande forme pour cette édition du Hellfest. Bien connu des fans français, le leader de Slipknot a démontré à tout le monde qu’il n’était pas qu’un masque d’horreur.
Le concert démarre dans une foule massive, Judas Priest jouant juste après. Le groupe surgit sur la musique « I Can’t Turn You Loose », d’Otis Redding. Les morceaux s’enchaînent assez vite. On peut regretter quelques intros/outros de Josh Rand à la guitare qui était en forme diabolique ce soir… Set de festival oblige, nous pardonnons donc !
Corey Taylor remercie très souvent le public. Il se saisit à la fin de sa guitare pour nous chanter la plus commerciale mais non moins délectable musique de son répertoire – Through The Glass. Le public du Hellfest chante en cœur, et chacun profite de ce moment privilégié avec ses amis et sa famille…
Nous remarquons que le chanteur est plus en forme que lors de son concert dernier au Bataclan, où il était un peu enroué de la voix.
Setlist
01. Whiplash Pants
02. Absolute Zero
03. Knievel Has Landed
04. Say You’ll Haunt Me
05. 30/30-150
06. Get Inside
07. Rose Red Violent Blue (This Song Is Dumb & So Am I)
08. Made Of Scars
09. Song #3
10. Through Glass (voir vidéo)
11. Fabuless
Judas Priest
Aucun doute, les bougres de Birmingham savent ce qu’ils font, en dignes bâtisseurs des fondations historiques du heavy metal. Traversant les décennies grâce à sa pate musicale indémodable, Judas Priest sévit depuis les seventies. Et ne semblent pas près de s’arrêter en si bon chemin. Au programme, moto rutilante, cuir, latex et clous… Une présence scénique qui n’a rien à envier aux Village People, entre l’esprit clinquant de Johnny Hallyday et un univers LGBT-friendly !
Plaisanteries écartées, Priest prouve une fois encore n’avoir de leçon à recevoir de personne après un show grandiose. Impossible de sortir déçu face à tant de démesure avoisinant le génie musical. Plusieurs heures durant, l’on se régale face un enchaînement maîtrisé par un Rob Halford au sommet, suivi par un Richie Faulkner très en forme. Firepower détonne – le nouvel opus des gaillards sorti en 2018. Tous les tubes y passent, entre Lightning Strike et Breaking The Law, avant un final magistral sur Painkiller qui ne se fera pas oublier de sitôt.
Un grand merci à Replica Promotion.
Vous trouverez toutes les photos du Hellfest 2018 – Jour 1 ici ! Et pour découvrir les jour 2 et jour 3, c’est ici.