Dimanche 6 avril, Natalie Dessay a fait ses adieux à la scène lyrique lors d’un dernier récital classique à l’Opéra de Lyon. Elle était accompagnée de son ami et collaborateur de longue date, le pianiste Philippe Cassard.

Deux artistes en harmonie

Natalie Dessay, soprano de renommée internationale, est la première artiste lyrique française à avoir obtenu le titre de Kammersängerin à l’Opéra de Vienne. Elle a commencé sa carrière avec des rôles spécialisés dans le répertoire de colorature. En 2013, elle se réoriente vers le théâtre et la chanson. Le récital qu’elle a donné ce dimanche avec Philippe Cassard est riche de symbolisme. Il évoque à la fois son passé, son présent et son avenir.

Philippe Cassard est un pianiste également reconnu à l’échelle internationale. Lauréat du premier prix au Concours International de Piano de Dublin en 1988, il s’est distingué comme soliste, récitaliste et chambriste. Il a été directeur artistique du festival Nuits romantiques du lac du Bourget et présente aujourd’hui une émission hebdomadaire dédiée à l’interprétation pianistique sur France Musique.

Les deux artistes travaillent ensemble depuis 2012 et ont déjà donné plus de 120 représentations à travers le monde. Ils ont également enregistré plusieurs albums, partageant une vision artistique commune. Philippe Cassard sublime les mots de la chanteuse, tandis que la voix de Natalie Dessay exprime une profondeur émotionnelle saisissante. Ensemble, ils accordent une grande importance au texte et à son sens.

Ce duo passionné a élaboré un programme riche de sens pour le dernier adieu de Natalie à la scène classique. Voir ces deux artistes se produire une dernière fois avec un répertoire si lyrique à Lyon, ville natale de la chanteuse, suscite une forte émotion.

Une première partie, comme un écho au passé de soprano léger de la cantatrice

Les aigus de Natalie Dessay, souvent comparés à la douce mélodie des chants d’oiseaux, trouvent un écho naturel dans ce programme centré sur les mélodies françaises du XXe siècle faisant référence aux volatiles.

Des Mélodies passagères op. 27 de Samuel Barber à la « Reine des Mouettes » de Poulenc, en passant par le Rossignol des Lilas de Hahn ou « Les trois beaux oiseaux du paradis » de Ravel, chaque pièce a été choisie avec soin et cohérence.

La technique irréprochable de la chanteuse, sa souplesse et la rondeur de sa voix nous transportent. La complicité entre les deux artistes est évidente, chacun tirant le meilleur de l’autre pour créer une harmonie parfaite.

La première partie s’achève avec « La Dame de Monte Carlo » de Francis Poulenc, une pièce poignante où Natalie Dessay déploie toute son énergie jusqu’à un final grandiose. Cet opus, qui évoque une femme désespérée prête à se jeter à la mer, révèle pleinement le talent expressif et dramatique de la chanteuse.

Une deuxième partie tournée vers l’avenir

Depuis plusieurs années, Natalie Dessay se passionne pour le théâtre, et tout particulièrement pour les comédies musicales américaines. La seconde moitié du récital est articulée autour de l’œuvre Knoxville: Summer of 1915 op. 24 de Barber. Cette pièce, exigeant une tessiture de voix grave, marque un tournant dans le répertoire de la chanteuse.

Avec le temps, Natalie Dessay a développé une voix plus profonde et centrée, lui permettant d’explorer de nouvelles expressions. Elle reconnaît que les rôles nécessitant une tessiture suraiguë correspondent à des rôles de jeunes filles, à une période de sa vie qu’elle souhaite désormais laisser derrière elle. Les comédies musicales américaines ouvrent de nouveaux horizons artistiques et renforcent sa polyvalence.

Pour enrichir cette transition, elle interprète également des œuvres de Menotti, très lié à Barber. La chanson Monica’s Waltz de Menotti met en avant son talent d’interprétation avec plusieurs personnages exprimés dans un seul morceau : la femme amoureuse, l’homme muet, et la narratrice. L’écoute attentive du pianiste complète merveilleusement cette performance.

Le récital se clôt avec I want magic tiré d’Un tramway nommé désir de Previn, laissant entrevoir l’avenir musical de Natalie Dessay dans un répertoire novateur.

Des rappels empreints de nostalgie

Les acclamations du public appellent Natalie Dessay et Philippe Cassard à revenir sur scène. Ils offrent alors « Pleurez mes yeux », l’air de Chimène extrait du Cid de Massenet. Natalie réalise une prouesse vocale, un dernier clin d’œil à ses rôles d’opéra.

Enfin, elle conclut avec « Tu m’as donné le plus doux rêve », extrait de Lakmé de Delibes. Ce morceau chargé d’émotions rappelle ses débuts et nous invite à tourner la page avec elle, vers un avenir plein de promesses.

Natalie Dessay et Philippe Cassard, tels deux « oiseaux de passage », ont su réveiller la nostalgie tout en ouvrant une porte sur des horizons artistiques prometteurs.

Je remercie l’Opéra de Lyon de m’avoir accordé leur confiance pour rédiger cet article et pour m’avoir permis d’assister à cette sublime représentation dont je garderai un souvenir ému.

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