Theory of Mind

par

7
sur 10

Kiko Loureiro (ex-Megadeth, ex-Angra) revient sur le devant de la scène avec un album instrumental qui explore la relation et les oppositions entre intelligence humaine et artificielle.

Theory of Mind est un nouvel arrivant dans l’immense océan du metal instrumental moderne offert par le virtuose Kiko Loureiro. Paru le 18 octobre dernier en autoproduction, il apporte bien des promesses. D’abord avec une note d’intention de son auteur que je vous glisse ici :

Theory of Mind explore l’intersection de la psychologie, des expériences personnelles et de la technologie. L’album reflète la capacité humaine à comprendre les autres – comment nous interprétons leurs pensées et leurs émotions, en particulier lorsqu’ils voient le monde différemment. Chaque morceau reflète ce voyage de connexion, la musique évoluant de l’incertitude initiale à une complexité plus profonde.

Le concept aborde également l’avenir de l’IA. Des études récentes suggèrent que, dans certains tests de théorie de l’esprit, les systèmes d’IA ont obtenu de meilleurs résultats que les humains. Bien que ces résultats n’impliquent pas que les machines comprennent ou éprouvent de l’empathie comme nous le faisons, ils remettent en question nos hypothèses sur la cognition humaine et soulèvent des questions profondes sur la nature de la conscience et sur ce que signifie être humain.

Version originale

Ensuite, des promesses stylistiques. Ceux qui ont déjà navigué dans les eaux du metal instrumental le savent, les productions se suivent, et se ressemblent… parfois un peu trop.

Alors, est-ce que Theory of Mind se démarque ? Kiko Loureiro réussit-il à traduire sa note d’intention en faisant chanter sa guitare ?

Et bien nous allons voir…

UNE SENSATION DE DÉJÀ OUÏE ?

Inutile de passer par quatre chemins, l’attente d’une révolution dans l’approche de l’instrument s’efface dès les premières notes. Ici, la guitare sera traitée comme très (trop ?) souvent : une alternative au chant par de nombreuses et virtuoses lignes mélodiques.

Prenez une solide base rythmique qui fonctionne (très bien d’ailleurs, avec de belles idées au fil de l’album), ajoutez-y un chanteur fait d’essences de bois et de cordes métalliques, et vous voici dans un monde jadis dominé par Joe Satriani, Steve Vai et consorts, et aujourd’hui peuplé de nombres de guitaristes qui tentent de jouer des coudes pour tirer leur épingle du jeu à grand coup de solos et d’envolées mélodiques.

Je taquine, je taquine, mais au fond j’aime bien. Il ne faut juste pas en écouter trop souvent, sinon la sensation de déjà ouïe arrive vite. “Borderliner” est d’ailleurs une bonne forme d’avertissement : si vous n’accrochez pas, n’allez pas plus loin. Il y a de la distorsion, une rythmique syncopée jouée dans le registre grave de l’instrument pour une touche de modernité par emprunt au djent, pendant que la ligne soliste s’applique à nous rappeler les influences néo-classiques, jazzy, et Satrianesques du musicien.

Ouverture efficace pour trier à l’entrée. Pour ma part, j’entre.

© Ricardo Santos

et l’intelligence dans tout ça ?

Une fois qu’on a mis les pieds dedans, on écoute et on admire des dizaines de notes qui filent sous nos yeux en harmonie. Mais le sens dans tout ça ?

Parce que faire chanter sa guitare c’est chouette, mais comment comprendre un langage qu’on ne parle pas ? C’est là que les titres et la note d’intention sont bien utile parce qu’il faut bien l’avouer, sans ça, bah… Difficile de se projeter.

Alors oui, on peut faire de l’interprétation en connaissance de cause pour imaginer que Kiko a voulu dire tel truc en jouant tel accord, mais bon. Est-ce utile finalement ? Ne vaut-il pas mieux l’ignorance pour projeter son histoire en contemplant, couché sur un tapis de mesures, un ciel constellé de notes aériennes ?

Du Coup c’est bien ou pas ?

Oui.

Pourquoi alors ? Parce que pour l’instant t’as pas mal taillé quand même !

Parce que :

Kiko Loureiro, avec Theory of Mind, nous ramène sur terre malgré des envolées mélodiques. L’album ne révolutionne pas le genre, c’est une certitude. La production est moderne, propre et lisse. Mais le jeu du virtuose traduit le caractère fusionnel du musicien avec son outil. L’artisan du son nous rappelle que jouer bien, ce n’est pas que aligner des notes très vite. Car si certains titres comme “Point of no Return” sont plus démonstratifs, le Guitar Hero a bien compris que le trop est l’ennemi du bien.

Ainsi, tout au long de l’album, le rythme s’étire et se resserre, les notes sont tantôt denses, tantôt éparses, mais toujours justes, et placées là où il faut.

ALORS DU COUP ON EN RETIENT QUOI ?

Si l’artiste a voulu transmettre un message dans son œuvre, il ne peut être compris qu’avec un contexte littéral défini, mais non nécessaire pour apprécier. Chacun y verra son histoire, et au fond, c’est pas plus mal.

Ce n’est assurément pas une révolution dans la musique instrumentale, mais Theory of Mind est une belle pierre que Kiko Loureiro ajoute à l’édifice de sa carrière.

Theory of Mind – kiko Loureiro
Pochette de l'album Theory of Mind - Kiko Loureiro

Artwork : Gustavo Sazes

1. Borderliner
2. Out of Nothing
3. Mind Rise
4. Talking Dreams
5. Blindfolded
6. Point of no Return
7. Raveled
8. Lost in Seconds
9. The Other Side of Fear
10. The Barefoot Queen
11. Finitude

 

 

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Theory of Mind

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